La mythique Terre de feu et la ville du bout du monde.

Dans cet article, nous poursuivons notre périple vers le sud de la Patagonie, la Terre de feu et Ushuaia. De longues heures de route au milieu de paysages dénudés et battus par les vents, pour rejoindre la ville la plus australe du monde. Nous vous donnons toutes les informations pour choisir une croisière sur le canal de Beagle et découvrir l’extraordinaire île Martillo peuplée de nombreux manchots.

Vers la Terre de feu

Une longue journée de trajet nous attend, en direction de la Terre de feu, l’île à l’extrémité de laquelle la célèbre ville d’Ushuaia est située. Nous quittons ainsi Puerto Natales par la route « 9 norte » qui longe la frontière argentine.

Cette dernière traverse de vastes étendues arides, à la végétation rase. Quelques arbres de taille modeste, aux formes biscornues, tous tournés dans la même direction, celle du vent, tentent de pousser dans cet environnement compliqué, hostile.

Vous pouvez retrouver l'article précédent : Parc national Torres del Paine

Des estancias infinies s’étendent de part et d’autre de la chaussée bétonnée. Seules leurs entrées sont visibles, signalées par de hauts portails en bois et, plus incongru, des abribus en bois au toit bleu.
Des milliers de moutons paissent de maigres touffes d’herbe. Quelques guanacos dressent le museau lorsque des véhicules, plutôt rares, passent.

Plus loin, la circulation est momentanément interrompue par le déplacement d’un troupeau ovin de plusieurs centaines de têtes. Les gauchos, juchés sur leurs chevaux, sont à la manœuvre, aidés par de nombreux chiens de bergers.

Nous suivons la route touristique chilienne « de la fin du monde », souvent rectiligne, au milieu d’un paysage désolé. D’ailleurs, le décor est monotone. Les kilomètres défilent lentement, bien que nous avancions à bonne allure, poussé par de violentes rafales.

Traversée du détroit de Magellan

Punta Delgada. La route s’arrête. La mer, aux reflets verts, parcourue de vagues soulevant de l’écume, fait son apparition. Nous sommes alors arrivés au bord du détroit de Magellan, à son point le plus étroit, moins de 5 kilomètres.

Vers l’est, l’océan Atlantique est distant d’une cinquantaine de kilomètres. Vers l’ouest, l’océan Pacifique est bien plus lointain et l’atteindre nécessite de se frayer un chemin à travers des dizaines d’îles et d’îlots. En face, la Terre de feu et, à son extrémité sud, à plus d’un demi-millier de kilomètres, la ville d’Ushuaia.


Informations pratiques ferry vers la Terre de feu

Un transbordeur de la compagnie Austral Broom assure la liaison entre Punta Delgada et Bahia Azul.

Horaires : toutes les heures (à la demie) de 8h30 à 1h30.
Durée de la traversée : 10 minutes. Compter 30 minutes au total avec l’embarquement et le débarquement.
Pas de réservation possible. Il faut faire la queue et espérer monter à bord ou attendre le suivant.

Tarif : 18000 CLP par véhicule, voiture, van ou camping-car, passagers (jusqu’à 6 personnes) inclus. Les billets s’achètent à bord.

Toutes les informations sur le site de la compagnie : Transbordadora Austral Broom


Arrivés une trentaine de minutes avant l’horaire de départ, nous embarquons à bord de l’imposant navire. Ensuite, la traversée est rapide. A peine le temps de faire la queue pour acheter le billet et de monter sur la passerelle pour quelques photographies que nous sommes arrivés de l’autre côté du bras de mer.

165 kilomètres nous attendent encore, jusqu’au poste frontière de San Sebastian. Si les étendues traversées jusqu’à présent étaient semi-désertiques, nous franchissons une étape supplémentaire dans la désolation. En effet, aucun arbre, ni même arbuste de la plus petite taille ne pousse sur ces terres battues par les vents.

En outre, les bourrasques sont si fortes que conduire est une lutte de tous les instants. Le véhicule se trouve balayé, poussé vers la gauche par les rafales venues de l’ouest. La vigilance est de mise, au risque de terminer rapidement dans le bas-côté. D’ailleurs, des débris de véhicules, des pneus, une carcasse de camion parsèment les abords de la route.

Désormais, les guanacos se font plus nombreux. Les troupeaux de moutons de race Linca également. Les points grisâtres, la couleur de leur laine qui, en Patagonie, n’est pas blanche, s’étendent à l’infini.

Les longues lignes droites de la route, parfois interrompues par des courbes qui sillonnent entre les limites des estancias, ne rencontrent aucune ville, aucun village, ni même de construction.

Frontière entre Chili et Argentine

Nous atteignons la frontière en fin d’après-midi. Rectiligne, elle sépare la terre de feu, entre la partie chilienne, peu peuplée, à l’ouest et la partie argentine, bien plus habitée, à l’est.
Se rendre à Ushuaia sans passer par le pays voisin est impossible. Les formalités de sortie du Chili sont néanmoins rapides. Pour entrer en Argentine cela ne prend guère plus de temps. De toute façon, pour quitter l’île il faudra bien repasser par là !

Nous avons bien roulé aujourd’hui et ainsi parcouru 500 kilomètres depuis Puerto Natales. Notre plus grande distance quotidienne depuis le début de ce périple. Il faut dire que les paysages étaient redondants, tristes après les splendeurs du parc Torres del Paine. Aucun endroit ne donnait envie de s’arrêter pour en profiter et le kilométrage est si important en Patagonie qu’il faut subir de longues heures de voiture.

Nous passons la nuit, juste après le passage de frontière, dans la minuscule localité de San Sebastian. Située en bordure de l’océan, qui demeure cependant invisible aux regards, la faute à un terre-plein surplombé d’une route, elle n’a aucun charme.

Cependant, le vent souffle si fort que la priorité, bien avant la recherche d’un emplacement agréable, est de s’en protéger. Ce qui n’est pas une mince affaire au milieu d’étendues planes. Les seuls abris sont offerts par les bâtiments. Ceux bordant la station-service YPF, un hôtel de l’automobile club argentin, font ainsi parfaitement l’affaire.


Itinéraire de Puerto Natales à Ushuaia

Deux jours.

De Puerto Natales à la frontière de San Sebastian. 500 kilomètres, 9 heures (incluant ferry et passage de la frontière). Routes asphaltées 9, puis 255 et 257.

Traversée Chili – Terre de feu : Transbordeur de la compagnie Austral Broom (liaison entre Punta Delgada et Bahia Azul). Toutes les heures (à la demie) de 8h30 à 1h30. 10 minutes de traversée. Pas de réservation possible (premier arrivé, premier à bord). 18000 CLP par véhicule, passagers (jusqu’à 6 personnes) inclus.

Camping sauvage San Sebastian (côté Argentine) : entre les bâtiments de l’hôtel Automobile club argentin et la station-service YPF. Gratuit. Absolument aucun charme mais protégé du vent. Toilettes de la station-service à disposition.

Le lendemain, de la frontière de San Sebastian à Ushuaia. 290 kilomètres, 4 heures. Route asphaltée. Plusieurs contrôles de police le long de la route.

Camping sauvage Ushuaia : 5 kilomètres avant d’arriver en ville, sur les rives de la rivière Olivia. Gratuit. Espaces herbeux. Cadre agréable. Tranquille la nuit.


Trajet vers Ushuaia

Le lendemain, nous poursuivons la route, toujours plus au sud. Il nous reste 300 kilomètres à couvrir avant d’atteindre Ushuaia.
L’itinéraire traverse les mêmes étendues désertiques que la veille. Des troupeaux de moutons, quelques vaches et des guanacos sont visibles à l’horizon. La seule différence est la présence de l’océan sur notre gauche. Les vagues de l’Atlantique viennent lécher des plages de graviers noirs.

Par la suite, la ville de Rio Grande apparaît tel un mirage. Il est étonnant de trouver une localité si étendue si loin de tout.
Les derricks, pompant inlassablement du pétrole, qui se distinguent sur les vastes steppes sont peut être un début d’explication. L’exploitation pétrolière et gazière semble être une activité importante de la région.

D’ailleurs, à regarder de plus près, les maisons et bâtiments sont plus cossus, plus grands, bâtis avec des matériaux autres que du bois et de la tôle, que dans les nombreux villages perdus au milieu de la Patagonie argentine plus au nord.

La deuxième ville que nous traversons, Tolhuin, confirme effectivement cette impression. Des aires de jeux pour enfants, skate-parks et terrains de sport synthétiques flambants neufs, témoignent d’une certaine prospérité, que nous n’avons encore jamais rencontré en Argentine.

De manière étonnante, les contrôles de police se multiplient sur la route. Certains nous ignorent, d’autres nous obligeant à nous arrêter, jettent un coup d’œil rapide à l’intérieur du van, nous posent quelques questions avant de nous autoriser à repartir. La mauvaise réputation de la police argentine, fortement corrompue (de bas salaires n’aident pas), ne rassure pas.

Alors que nous avons parcouru les deux tiers de la Terre de feu, le paysage change rapidement et radicalement. D’abord, des collines font leur apparition. Puis des montagnes s’élèvent à l’horizon.

Les landes dénuées de végétation cèdent alors leur place à d’immenses forêts dont les arbres tentent de survivre, parasités par des mousses et lichens. Des rivières s’écoulent des éminences vers des lacs si grands qu’ils font penser à la mer.

Arrivée à Ushuaia

La route s’élève, passe un petit col puis descend vers l’extrême sud, vers Ushuaia. Nous atteignons finalement la soi-disant et autoproclamée ville la plus australe de la planète.
Et cela ne nous procure que peu d’émotion…

Peut-être car un village chilien, Puerto Williams, situé sur une autre île, est en réalité plus au sud. Que la ville est si vaste, sans aucun charme, qu’il est difficile de penser arriver au “bout du monde”. Ou car la présence d’un hypermarché Carrefour enlève tout côté pittoresque pour nous français. Peut-être enfin car sa situation, enclavée dans le canal de Beagle, entourée de montagnes, ne donne pas l’impression d’être au bout du monde.

D’autant plus qu’Ushuaia est bruyante, entre les bruits de klaxons qui résonnent et la circulation, dense, importante.

Alors que les conditions climatiques sont souvent maussades, nous découvrons Ushuaia illuminée par de franches éclaircies. Le vent est complètement tombé. Heureusement car le fond de l’air est bien frais.
Les constructions, usines, hôtels et immeubles d’habitation s’étagent sur les collines qui enserrent la ville d’un côté, tandis qu’elle est bordée par la mer de l’autre. Plusieurs imposants navires de croisière sont amarrés dans le port, ainsi que des frégates de la marine argentine.

Plus tard, nous entrons dans l’office de tourisme, situé à proximité du port pour faire tamponner nos passeports aux couleurs d’Ushuaia. Des tampons aux formes et aux dessins différents sont gracieusement mis à disposition des touristes.

En ressortant, nous traversons l’espace sur lequel les agences de voyage proposent des excursions sur le canal de Beagle. Dans un premier temps sceptiques – les sorties proposées semblent identiques, sur des catamarans accueillant plusieurs dizaines de touristes et nous envisagions plutôt de randonner le lendemain – nous sommes finalement séduits par la proposition de l’agence Paludine.


Informations excursions canal de Beagle

Plusieurs excursions sur le canal de Beagle et dans les environs d’Ushuaia sont proposées, à la demi-journée (départs à 9h et 15h) ou sur une journée complète (souvent de 9h à 16h ou 17h).
Mentionnons que les excursions peuvent être annulées en cas de vents forts.

La navigation la plus populaire à Ushuaia est une mini croisière sur le canal de Beagle. Les bateaux font alors le tour des îles Bridges et Alicia, situées au large de la ville, puis naviguent jusqu’au phare des éclaireurs.
Des oiseaux et animaux marins (lions de mer, cormorans…) sont visibles.
L’excursion dure 2h30 et coûte 12000 pesos. Elle peut être effectuée toute l’année.

Une seconde proposition, plus complète, est une croisière qui emprunte l’itinéraire énoncé ci-dessus puis se poursuit jusqu’à l’île Martillo, également surnommée l’île aux manchots (« Isla de los Pinguinos »). En effet, cette dernière accueille de nombreux manchots de Magellan, mais également, bien plus rares en dehors de l’Antarctique des manchots Papou.
L’excursion dure 5h et coûte environ 20000 pesos. Les manchots nidifient sur l’île entre mi-octobre et fin mars.

Une troisième option consiste à combiner la croisière complète (canal de Beagle et navigation autour de l’île Martillo) avec une visite de l’estancia Harberton, située à proximité. Le retour vers Ushuaia s’effectue ensuite en bus (1h30 de trajet).
Excursion de 8h, environ 40000 pesos.

Ces excursions s’effectuent, en fonction des agences, sur des catamarans pouvant accueillir une centaine de passagers ou sur des bateaux d’une capacité de 25 à 30 personnes.

Néanmoins, deux alternatives, proposées par les agences Paludine et Piratour, offrent des expériences plus privilégiées.

En effet, Piratour est la seule agence à être autorisée à débarquer sur l’Isla Martillo. Les heureux participants, une douzaine par excursion, peuvent alors approcher les manchots en effectuant une randonnée pédestre d’une heure sur l’île. Evidemment, le prix est à la hauteur de l’expérience vécue, compter 200 USD par personne (plus l’entrée à l’estancia Harberton, 25 USD environ). De novembre à mars, tous les jours sauf le mardi.

Agence Paludine. Les excursions proposées s’effectuent non pas sur des catamarans de grande taille mais sur des semi-rigides avec un nombre limité de touristes. Dix pour celle dans le canal de Beagle, autour des îles au large d’Ushuaia et vingt personnes au maximum pour celle vers l’île Martillo. Le principal avantage est de pouvoir approcher au plus près des différentes îles et donc des animaux, grâce à de petites embarcations. Plus d’informations dans l’article suivant (Canal de Beagle).


Nous réservons nos places pour le lendemain, effectuons quelques courses, puis quittons la ville.

Nous avons repéré des emplacements pour passer la nuit, sur les rives de la rivière Olivia, cinq ou six kilomètres avant d’arriver à Ushuaia. Lorsque nous approchons, plusieurs vans sont déjà installés, mais les surfaces herbeuses sont si étendues que nous ne serons pas gênés par les voisins.

Le cadre est enchanteur, un cours d’eau limpide qui serpente entre de nombreux arbres au fond d’une vallée profonde. Le seul (petit) élément négatif est la présence de la fréquentée (dans la journée) route numéro 3 à courte distance. Le soir, la circulation se raréfie et l’endroit se trouve finalement plongé dans une douce tranquillité.


Informations pratiques

Traversée Chili – Terre de feu : Transbordeur de la compagnie Austral Broom (liaison entre Punta Delgada et Bahia Azul). Toutes les heures (à la demie) de 8h30 à 1h30. 10 minutes de traversée. Pas de réservation possible (premier arrivé, premier à bord). 18000 CLP par véhicule, passagers (jusqu’à 6 personnes) inclus.

Camping sauvage San Sebastian (côté Argentine) : entre les bâtiments de l’hôtel Automobile club argentin et la station-service YPF. Gratuit. Absolument aucun charme mais protégé du vent. Toilettes de la station-service à disposition.

Stationnement Ushuaia : nombreux parkings gratuits en ville. Le plus central étant celui du front de mer, à proximité du port, de l’office de tourisme et des agences proposant des excursions.

Camping sauvage Ushuaia : 5 kilomètres avant d’arriver en ville, sur les rives de la rivière Olivia. Gratuit. Espaces herbeux. Cadre agréable. Tranquille la nuit.


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