Extraordinaires eaux turquoise. Un vent violent. Plusieurs confluences.

Dans cet article, nous empruntons la majestueuse mais effrayante route 265, en longeant la rive sud du lac General Carrera. Puis, de retour sur la route australe, nous poursuivons vers le sud et la localité de Cochrane. En chemin, nous découvrons les confluences des rivières Baker, Nef et Chacabuco.

Sur les rives du lac General Carrera, merveilleuse route 265

Après deux jours de détour dans le parc national Patagonia, le long de la frontière argentine, nous poursuivons la descente de la route australe. Cependant, la première étape consiste à la rejoindre !
Depuis Chico Chico, cent vingt kilomètres de piste, et plusieurs heures de trajet, nous attendent. Pour l’avoir emprunté, dans le sens inverse, trois jours auparavant, nous savons que la conduite ne sera pas une partie de plaisir. Mais le paysage devrait être magnifique.

Vous pouvez retrouver l'article précédent : Piedra Clavada, la Pierre Clouée

La route 265, non asphaltée, creusée de profondes ornières longe le lac General Carrera sur toute sa longueur. Certains passages, dangereux, glissants, pourraient bien nous faire chuter dans les flots si nous ne prenons pas garde.
En effet, pour franchir le col Las Llaves, les difficultés se multiplient. Virages en épingle à cheveux, gravier, précipices au-dessus du lac sans glissière de sécurité, virages abrupts…

D’ailleurs, à peine quittons-nous la ville de Chile Chico, où nous avons effectué quelques courses et pris de l’essence, que nous croisons une dépanneuse transportant une voiture accidentée.
En conduisant prudemment et à vitesse modérée, tout devrait néanmoins bien se passer !

Lac General Carrera

Quelques nuages flottent dans le ciel bleu, ondulent autour des lointains sommets enneigés qui s’élèvent à l’extrémité du lac. En fonction de la luminosité, des zones d’ombres et du vent, la couleur de ce dernier varie entre le bleu profond et le turquoise.

Le lac General Carrera est agité de vagues, soulevées par les violentes rafales qui secouent également notre van. L’écume qui se forme à sa surface et son immensité ne sont pas sans rappeler la mer.
Sur la gauche, des collines dont la couleur alterne entre le rouge de la roche et le vert de la végétation bordent la piste blanchâtre.

Nous avançons tranquillement, en profitant du panorama. Cela fait plusieurs jours que nous parcourons les rives du lac General Carrera et nous sommes complètement sous le charme. D’autant plus, et c’est une constante de cette première partie de notre périple en Patagonie, qu’il n’y a personne. Les véhicules se comptent en effet sur les doigts de la main.

La majeure partie de l’itinéraire s’effectue en longeant ou surplombant le lac, offrant donc de magnifiques points de vue à chaque virage. Les déclinaisons de turquoise du lac nous subjuguent alors à chaque instant.

Seul point noir, le vent qui souffle avec une intensité rare (pour nous qui vivons en Europe, en Patagonie cela est ainsi bien plus fréquent). Ouvrir les portières est un vrai challenge à chaque fois, l’important est surtout de se garer face aux rafales afin de ne pas perdre une porte. En outre, à certains moments, se tenir debout est presque impossible.

Les heures passent, nous approchons de l’extrémité sud-ouest du lac General Carrera et retrouvons bientôt la route australe.

Dans cette partie, les couleurs turquoise sont encore plus marquées, encore plus impressionnantes, surréalistes. Les montagnes à l’arrière-plan sont prises dans les nuages. Ces derniers virevoltent, cachent puis dévoilent glaciers et vallées. Les lumières sont magnifiques, l’ambiance extraordinaire.

Camping sauvage entre les lacs General Carrera et Bertrand

Lorsque nous atteignons la Carretera Austral, au lieu de tourner à gauche et nous diriger vers Cochrane, nous remontons vers le nord, sur six kilomètres. Jusqu’au pont métallique, rouge, sur la rivière General Carrera, par laquelle le lac éponyme se déverse dans un second lac, Bertrand.

L’après-midi est bien avancé, nous restons donc ici pour passer la nuit, en bordure du cours d’eau, à la couleur somptueuse. Lorsque nous tournons la tête de l’autre côté, la vue est également sympathique, des glaciers suspendus apparaissent dans le lointain.


Itinéraire de Chile Chico à Cochrane

Deux jours.
120 kilomètres de Chile Chico au pont General Carrera (à l’extrémité du lac éponyme). Route non asphaltée 265. 4 heures.

Camping sauvage pont de la rivière General Carrera (à l’extrémité sud-ouest du lac General Carrera). Tourner sur la piste à gauche juste après le pont (en venant du sud). Plusieurs emplacements en léger surplomb de la rivière, certains ombragés. Vue sur le pont. Au calme. Pas de commodités.

Puis, le lendemain, route australe (portion non asphaltée) jusqu’à Cochrane. 70 kilomètres et 1h30. Journée tranquille.
Découverte des confluences entre les rivières Baker et Nef et entre Baker et Chacabuco. Guanacos en bordure du parc Patagonia.

Camping sauvage en surplomb de la rivière Baker (piste X-890) : depuis la route australe (en face du musée Pioneros del Baker) prendre la direction « Pasarela El Manzano ». Entre l’embranchement et le pont sur la rivière Baker, plusieurs emplacements. Très tranquille (nous étions seuls), vaste prairie herbeuse, ombragé. Vue sur la rivière Baker à travers la végétation et sur les sommets enneigés. Pas de commodités.


Trajet vers Cochrane

Le lendemain, le ciel est couvert au réveil, puis il se met à pleuvoir. Le point positif est que la saleté de la piste restera certainement plaquée au sol et que nous ne finirons peut-être pas la journée couverts de poussière.

Nous quittons définitivement les rivages du lac General Carrera et avons pour objectif de nous approcher de la frontière argentine, dans les environs de Cochrane.

La route australe que nous suivons depuis une douzaine de jours se poursuit sur 230 kilomètres jusqu’à Villa O’Higgins. A l’exception du village sur pilotis de Caleta Tortel, cette portion est probablement la moins intéressante.
En outre, il faudrait la parcourir en aller-retour avant de revenir à Cochrane pour franchir la frontière argentine. De plus, il faut bien faire des choix si nous voulons atteindre Ushuaia, avant de remonter vers Pucon !

Avant le départ de ce périple, nous pensions que le temps serait bien plus maussade et que les journées pluvieuses nous permettraient d’avancer plus rapidement. Mais un franc soleil permanent nous a incité à en profiter et à prendre notre temps. Décision est donc prise de ne pas nous aventurer sur la route australe au-delà de Cochrane.

Le seul et unique poste frontière de la région est celui du Paso Rodolfo Roballos. La piste qui y conduit est en mauvais état, mais en roulant doucement nous devrions néanmoins passer avec le van.

Après le lac General Carrera, la route australe, qui n’est pas asphaltée, longe le lac Bertrand, puis la rivière Baker qui s’en écoule.
Le cours d’eau turquoise, tumultueux, trace son chemin entre des forêts et des gorges étroites. Avec en toile de fond des montagnes enneigées, prises dans les nuages. Tandis que leurs bases sont couvertes de Lengas également dénommés Hêtres de la Terre de feu.

La rivière est réputée pour les descentes en rafting et la pêche à la mouche. Les lodges de pêche se sont ainsi multipliés dans la région, privatisant les rives qui, clôturées, sont devenues inaccessibles.

Confluence entre les rivières Baker et Nef

Après une dizaine de kilomètres, nous arrivons à la confluence, le lieu de rencontre, entre les rivières Baker et Nef. Une marche de quelques centaines de mètres permet d’observer le phénomène.
Les eaux turquoises de la première se mêlent aux eaux laiteuses de la seconde. Lorsque le Rio Baker poursuit sa course, sa couleur a perdu en intensité.

En quelques minutes, le temps change totalement. De franches éclaircies illuminent alors le paysage lorsque nous approchons des impressionnants rapides du cours d’eau.

Au second plan, des collines à la végétation rase, majoritairement herbeuse, jaunâtre, parsemées de quelques arbustes verts forment un magnifique contraste. Dans le lointain, encore pris dans les nuages, des glaciers blancs et des sommets noirs commencent à se dévoiler.

Plus tard, nous poursuivons l’itinéraire, mais quittons quelques instants la route australe en bifurquant sur la piste X-890. Elle descend jusqu’à la rivière Baker, qu’elle franchit sur un pont métallique récent avant de remonter de l’autre côté.
En chemin, plusieurs emplacements de camping sauvage accessibles en van nous attirent. Dommage que nous ne restions pas (du moins le pensions-nous à cet instant) dans les environs pour la nuit.

Par la suite, nous retrouvons la route australe, découvrons une seconde confluence, celle entre les rivières Baker et Chacabuco puis continuons vers la ville de Cochrane.

Les paysages traversés nous rappellent alors les profondes vallées et les canyons péruviens, en particulier la région d’Ayacucho. Seules différences notables, l’absence de lamas et d’alpagas et un ciel, certes bleu, mais pas aussi profond que celui des Andes bien plus au nord.
En parlant de camélidés, nous apercevons, à bonne distance, nos premiers guanacos.

Localité de Cochrane

Cochrane. Le point le plus méridional de notre périple sur la route australe. C’est le début d’après-midi lorsque nous entrons dans la grande ville de la région. En réalité, un bourg endormi balayé par de violentes rafales de vent. Les tourbillons soulèvent les feuilles mortes dans les rues et font claquer les toits en tôle métallique des habitations.

Il n’y a personne dehors, les commerces sont fermés, par conséquent rien n’incite à s’attarder. Nous prenons de l’essence et allons poser quelques questions (au sujet de la possibilité de dormir dans le parc Patagonia) au petit office de tourisme situé sur la place d’armes. Mauvaise nouvelle, il n’ouvre qu’à 15 heures, ce qui retarde notre départ vers la frontière argentine. De surcroît, les réponses à nos interrogations ne sont pas plus positives.

La piste vers le poste frontière de Paso Roballos traverse le parc Patagonia, il est donc interdit d’y dormir en dehors des trois zones officielles. Qui facturent un tarif exorbitant, 8000 pesos par nuit et par personne, auquel s’ajoute le droit d’entrée du parc (même si nous ne restons que pour la nuit), 9000 pesos. En revanche, emprunter la piste jusqu’à la frontière sans s’arrêter dans le parc exonère de payer le droit d’entrée.

Nous tentons donc de négocier pour ne pas payer l’entrée, arguant que nous disposons déjà des billets, payés quelques jours auparavant pour découvrir le secteur Jeinimeni du même parc. Ces derniers ne sont cependant plus valables selon notre interlocutrice, un laps de temps trop important s’est écoulé (comme la validité n’est pas clairement indiquée, cela se fait à la tête du client).

Cela nous dissuade de tenter d’approcher de la frontière dès maintenant. Dans ces conditions, nous effectuerons la route le lendemain.

Avant de trouver un endroit où dormir, la mission est de trouver une source d’eau pour remplir nos réserves. La rivière Baker est parfaite, nous en profitons pour découvrir le petit bac qui effectue la liaison entre ses deux rives, quelques kilomètres avant Cochrane.

Puis, nous nous dirigeons vers les emplacements repérés le matin même, en surplomb du cours d’eau, le long de la piste X-890. Une prairie herbeuse constitue l’endroit idéal.
Nous sommes à bonne distance de la poussière soulevée par le passage de quelques rares véhicules, à l’ombre, avec une jolie vue sur la rivière et les montagnes enneigées.


Informations pratiques

Camping sauvage pont de la rivière General Carrera (à l’extrémité sud-ouest du lac General Carrera). Tourner sur la piste à gauche juste après le pont (en venant du sud). Plusieurs emplacements. Au calme. Pas de commodités.

Camping sauvage en surplomb de la rivière Baker (piste X-890) : depuis la route australe (en face du musée Pioneros del Baker) prendre la direction de « Pasarela El Manzano ». Très tranquille, vaste prairie herbeuse, ombragé. Pas de commodités.


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